Avertissement Raconter l'histoire de Jeanne-Marguerite de Montmorency a été, tout d'abord, chose facile. Pensez ! Une sorte de princesse, belle riche et douée, promise à toutes les gloires, devenant dans un premier temps une servante pauvre et humiliée, pour finir ensuite ermite et dont la mort reste un mystère, quel beau thème romanesque et rarement exploité en littérature où son contraire abonde et domine... Mais arrive le moment où l'auteur doit s'effacer derrière la correspondance entre l'héroïne et son directeur de conscience ; et les commentaires personnels effraient... Rythmé par les rares et longs trajets du voiturier, ce lent dialogue entre Luc de Bray, un moine théologien, et Jeanne-Marguerite, une mystique, désarçonne l'homme moderne plus ou moins nourri de rationalisme. L'aventure de cette femme exceptionnelle mesurée à cette aune risque de devenir un bel exemple de "dilapidation suicidaire", un cas intéressant diraient les psys... Il faut à cette histoire l'éclairage de l'inconcevable, d'où mon embarras. Pour parler comme Jean-Baptiste Geffroy évoquant Maurice Barrès, je ressens la religion comme un trouble du sentiment ; ma religion est tournée vers la chaîne des ancêtres, vers la terre et les morts. Je peux, tranquillement, faire miennes les paroles de l'auteur des "Déracinés" : "Pour moi, j'ai besoin, sinon je me dessècherais, de me plonger dans la masse des idées et des sentiments chrétiens qui me firent à travers les siècles ce que je suis aujourd'hui." Cela pour expliquer que je ne me sentais pas le mieux placé pour raconter l'histoire de cette femme hors du commun. Oui, mais voilà, à vivre quotidiennement avec elle quelques mois, je me suis pris à l'aimer, et il est bien connu que l'amour donne toutes les audaces... C'est là ma seule excuse...